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La France perdra la Côte d’Ivoire à cause de son hypocrisie politique

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« La liberté est le même droit que la liberté de penser, l’une répond au cœur, l’autre à l’esprit ; ce sont les deux faces de la liberté de conscience ; elles sont au plus profond (Victor Hugo).

Entre la France et la Côte d’Ivoire, c’est une très vieille histoire, intime et ambiguë. La complexité des relations entre les deux pays est en grande partie imputable au contexte qui prévalait à la fin des années 1950. Après le « Non » de la Guinée au référendum constitutionnel du 28 septembre 1958 proposé par le Général de Gaule revenu au pouvoir sous la pression de l’armée, tous les plans du colonialisme français étaient bouleversés : la Communauté franco-africaine prévue par la nouvelle constitution de la 5e République et destinée à continuer la colonisation sous d’autres formes était dépassée par l’accélération de l’histoire. Toutes les masses africaines exigeaient l’indépendance immédiate comme la Guinée. Finalement, Paris se résolut à octroyer à la hâte l’indépendance à tous ses anciens territoires d’Afrique, même si pour cela il fallait forcer la main à ses serviteurs réticents ou paniqués à l’idée de ne plus être Français. On peut citer Léon Mba du Gabon et Félix Houphouët Boigny de Côte d’Ivoire. Cependant, l’impérialisme français n’entendait en rien céder sur son objectif initial de garder les anciennes colonies sous sa coupe.

Apres les indépendances « octroyées », la France dans ses anciennes colonies sous la houlette du président Général de Gaulle, a mis en place des gouverneurs locaux censés s’assurer que les ressources naturelles et géopolitiques de ces pays bénéficieraient toujours à l’ancienne puissance coloniale. Lorsque ces états eurent la possibilité d’élire démocratiquement leur représentant comme au Togo ou en Centrafrique, ceux-ci furent renversés ou/et assassinés avec l’aide de l’armée française (Sylvanus Olympio, Abel Goumba à la suite de Boganda, Mehdi Ben Barka, Outel Bono, Ruben Um Nyombé, Félix Moumié). Ce sont les pions aux mains de Foccart-De Gaulle (Eyadéma, Bongo, Déby, Bokassa…) qui seront à la tête de ces nouveaux états « indépendants » dont bon nombre sont issus des services secrets français ou de l’armée française.

La France a toléré la rébellion en Côte d’Ivoire

La France n’a jamais changé sa façon de faire la politique en Afrique. Elle impose toujours ses amis au pouvoir et lorsqu’elle n’arrive pas, elle crée une rébellion. Les Ivoiriens ne sont pas dupes. En observant toutes les rebellions africaines, on s’aperçoit soudainement que les leaders se prennent pour des objecteurs de consciences et défenseurs d’une cause. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, Monsieur SORO Guillaume, dans son livre intitulé « Pourquoi je suis devenu un rebelle. La Côte d’Ivoire au bord du gouffre », dit avoir pris les armes pour plusieurs raisons. La menace qu’il combat est triple : il veut éviter les massacres d’un génocide de plus en plus probable, pallier l’inaction des pays riches et surtout renverser le régime de Laurent GBAGBO. Sans polémiquer sur les raisons qui ont poussé le leader des Forces Nouvelles à prendre les armes contre son pays, il est évident qu’il a eu certainement le soutien tacite de la France. Après l’arrivée du Président Gbagbo au pouvoir, la France nébuleuse a compris qu’elle perdait ses intérêts en Côte d’Ivoire. Il fallait tout faire pour chasser le Président Gbagbo au pouvoir. La France est le seul pays développé qui a peur de la mondialisation. Elle cherche toujours des positions de monopole dans ses anciennes colonies. Et les Présidents qui souhaitent multiplier les partenaires commerciaux ne sont pas les bienvenus. La France cherchera à contrôler l’élite au Congo pour profiter de son pétrole. C’est la même chose en République Démocratique du Congo. C’est pour assurer l’approvisionnement d’AREVA en bauxite que la France ferme les yeux sur la volonté populaire au Niger. En fait, il ne revient pas aux Africains de décider pour eux-mêmes. Triste destin pour les peuples Africains. En vérité, les Présidents Français sont tous les mêmes, ils changent simplement de couleur comme le caméléon sinon leur nature reste la même. Ils affectionnent les guerres de protection d’intérêts. Ainsi les Bouygues et Bolloré ont obtenu des marchés de construction ou de concessions portuaires dans différents pays au prix forts même si d’autres concurrents peuvent le faire à moindre coût. L’UEMOA et le ministre du commerce de Côte d’ivoire, ont dénoncé les conditions d’attribution du terminal à conteneurs du port d’Abidjan car elles font du port ivoirien l’un des plus chers de la sous-région. Les travaux du vilain pont Henri Konan Bédié ont été facturés à près de 154 milliards de francs CFA.

La France perdra définitivement la Côte d’Ivoire avec sa politique actuelle

Aujourd’hui, la France estime qu’elle est solidement présente en Côte d’Ivoire. Elle a chassé le Président Gbagbo pour installer un ami au pouvoir. Le seul problème c’est qu’on n’investit pas pour un retour sur investissement à court terme. C’est la raison pour laquelle les économistes estiment que la stabilité politique est devenue une variable pertinente en économie. Les Africains diront « qu’on ne lance pas un caillou en direction de son canari ». Dans une logique conservatrice, la France a créé les conditions de sa perte en Côte d’Ivoire.

Lors de sa dernière visite en Côte d’Ivoire, Pierre Gattaz., le patron du MEDEF affirmait que les parts des entreprises françaises en Côte d’Ivoire, en termes d’investissements, ont chuté à « 10% » aujourd’hui contre « 20 à 25% » il y a 20 ans. Néanmoins, selon lui, la France reste « le premier investisseur en Côte d’ivoire ».

Le Patron du MEDEF, qui conduisait une délégation de 150 chefs d’entreprise français à Abidjan a affirmé  que son pays gagnerait à se réveiller. « Si on ne fait rien, si on ne bouge pas, si on reste terrorisé en France par la mondialisation, ça va aller de mal en pis ». Si la France veut accroitre ses investissements en Côte d’Ivoire, alors elle doit changer sa façon de faire. Ceux qui sont actuellement au pouvoir sont des hommes, ils ne sont pas éternels. Or, les frustrations sont énormes dans notre pays. Mgr Siméon Ahouana, le président de la Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes (CONARIV) disait ceci : “le malaise est profond en Côte d’Ivoire, cinq ans après la fin de la crise postélectorale de 2011”. Pour lui, il convient, à présent, de mettre un accent particulier sur les initiatives en faveur de la réconciliation. Il a reconnu que “malgré une élection présidentielle apaisée et les nombreux efforts en faveur de la réconciliation, les poches de division demeurent, les cœurs sont encore chargés de rancœurs, de frustrations, d’amertumes et d’esprit de vengeance”. Cette déclaration de Mgr Siméon Ahouana suffit pour alerter la France. Elle doit obliger les autorités actuelles à libérer les milliers de prisonniers politiques et œuvrer au retour sécurisé des exilés politiques.

Par-dessus tout, la France doit s’activer pour la libération du Président Gbagbo et de Blé Goudé. C’est l’hypocrite politique et l’immobilisme de la France qui détruiront les intérêts de ce pays en Côte d’Ivoire. La France a toujours influencé les résolutions sur la Côte d’Ivoire, à l’Onu. Lors d’un entretien, le Président Gbagbo révélait ceci : « la France s`ingère de la plus mauvaise manière. Toutes les résolutions qui ont lieu sur la Côte d`Ivoire à l`ONU, c`est la France qui écrit le draft Nous l`avons contesté plusieurs fois ». Il poursuit pour dire  “l`Union Européenne (UE), elle suit la France. Dans les relations entre les grandes puissances aujourd`hui, chacun a sa zone d`influence. Et quand il s`agit des pays francophones d`Afrique noire, quand la France parle, tous les autres suivent”. Les ivoiriens, dans leur grande majorité, attendent que la France joue un rôle de premier plan dans la réconciliation en Côte d’Ivoire. La France doit savoir que l’Afrique change, les africains également. Il est vrai que la mutabilité de la conscience noire en général et en particulier africaine en particulier, reste à peine discernable dans la conscience occidentale. Et pourtant, l’Afrique est un continent en mouvement. Point n’est besoin d’être un féru de politique internationale, pour le savoir.

L’existence sociale des hommes détermine leur pensée…… et la vérité doit s’inspirer de la pratique. C’est par la pratique que l’on conçoit la vérité. Il faut corriger la vérité d’après la pratique. A mon humble avis, le futur de la Côte d’Ivoire dépend de la réconciliation, qui elle-même est liée à la libération du Président Gbagbo.

PRAO YAO SÉRAPHIN

Source: eburnienews

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