CONGO : Sassou Nguesso n’échappera pas à la justice (Tribune libre)
Au Congo-Brazzaville, au-delà de la modification constitutionnelle qui lui ouvre désormais les portes du pouvoir à vie, ce lecteur pense que Denis Sassou Nguesso s’est explicitement arrangé pour échapper à la justice. Il cite notamment l’article 96 de la constitution récemment adoptée par référendum. Et si le président de la République s’est donné tant de mal, c’est probablement parce qu’il se reproche des choses dont il n’a pas à être fier. Allant plus loin, l’auteur de la tribune que nous proposons pense même qu’il y a des raisons plutôt plausibles que Denis Sassou Nguesso soit derrière la mort, en 1977, de l’ancien président Marien Ngouaba. Ceci pourrait alors expliquer cela.
L’homme se croyait-il plus intelligent que tout le monde en incluant dans sa constitution taillée sur mesure, l’article 96?
Article 96 : Aucune poursuite pour des faits qualifiés crime ou délit ou pour manquement grave à ses devoirs commis à l’occasion de l’exercice de sa fonction ne peut plus être exercée contre le Président de la République après la cessation de ses fonctions.
La violation des dispositions ci-dessus constitue le crime de forfaiture ou de haute trahison conformément à la loi.
Mais seulement voilà, lorsque François Soudan lui demande ce qui s’est passé le 18 mars 1977, monsieur Denis Sassou Nguesso répond ainsi, en moins de trois minutes :
C’est très simple à raconter : j’étais ministre de la défense … je suis resté au bureau jusqu’à 13 heures, 13 heures trente, quatorze heures, peut-être.. Puis, je suis allé me rafraîchir chez moi à Mpila. Et dès que je suis arrivé, Lékoundzou téléphone pour me dire qu’il entend des tirs nourris en direction de l’état-major général…, j’ai juste remis mon ceinturon … et je suis revenu. Je fonçais naturellement vers mes bureaux au ministère de la défense; quand je suis arrivé devant la mairie … c’est là où on m’a dit que le président Ngouabi est grièvement blessé et on l’a emmené à l’hôpital militaire[1]
Voilà la déclaration d’un ministre de la défense sur l’assassinat d’un président en exercice.
Lui qui avait le contrôle absolu des services de sécurité a été informé par un civil, disons un copain, en mission à Brazzaville et qui, curieusement, était logé à l’hôtel « Le Mistral »!
N’est-ce pas un peu court?
Il n’y a que monsieur Sassou Nguesso pour croire qu’il peut s’en tirer ainsi, à si bon compte.
Qu’en dit Pierre Mabiala? Qu’en dit Oko-Ngakala? Diront-ils qu’il y a prescription? Pourquoi Denis Sassou Nguesso a-t-il choisi de traiter une question d’une telle importance devant un journaliste partisan alors qu’il aurait pu faire parvenir, par écrit sa version des faits, à la conférence nationale souveraine?
Lorsque François Soudan réalise son documentaire de propagande, Denis Sassou Nguesso qui a suivi les travaux de la conférence nationale souveraine n’a certainement pas oublié les interrogations du Docteur Kouka Bemba sur la propreté du corps du président Ngouabi alors que celui-ci est mort de manière brutale et violente à la suite de la rupture de son artère carotide?
Pourquoi n’y répond-il pas, lui qui s’est bâti une réputation de policier méticuleux?
Pourtant bien des questions brûlent les lèvres de tous les congolais ordinaires épris de justice : Si le corps du président Marien Ngouabi a été nettoyé et rhabillé, cela ne veut-il pas dire que des habits de rechange ont été obtenus au domicile de ce dernier?
Où est le procès-verbal d’audition de madame Céline Ngouabi?
Pour cela, un devoir national appelle tous les professionnels de la justice, du Congo et/ou d’ailleurs, toutes spécialités confondues d’œuvrer à l’élaboration d’un solide dossier pour la révision du procès de l’assassinat du président Marien Ngouabi marqué par de trop nombreuses zones d’ombre.
Le président de la commission d’enquête, Gaston Eyabo, avait fini par démissionner le 26 mars 1977 pour avoir constaté qu’en rendant compte au ministre de la défense Sassou Nguesso de la progression de son investigation, il apprenait à la radio que les suspects ou les témoins étaient passés en cour martiale et exécutés. Lui, enquêteur, à qui revenait la responsabilité d’établir les preuves de l’implication des suspects, n’avait jamais remis ses conclusions à la cour martiale, vu que l’investigation devait se poursuivre. [2]
Quelle était la composition de cette cour martiale? Qui l’a instaurée?
Il est ressorti de plusieurs témoignages que l’unique centre décisionnel post-assassinat du président Marien Ngouabi était le Ministère de la défense, et on sait qui était le ministre de la défense : Denis Sassou Nguesso. IL NE PEUT PAS ÉCHAPPER À LA JUSTICE.
C’est donc sous la responsabilité totale et entière du ministre de la défense qu’ont été donnés l’ordre d’arrestation du président Alphonse Massamba-Débat, l’ordre d’arrestation du capitaine Kimbouala-Nkaya, l’ordre d’enlèvement du Cardinal Émile Biayenda et bien d’autres, dans le but de faire diversion.
Lorsque les agents du Secret Service ont ramené à Washington le corps du président John F. Kennedy, ils étaient tous honteux et surtout torturés par le remords d’avoir failli à leur mission d’assurer la sécurité du président des États-Unis d’Amérique. C’est le président qu’ils devaient ramener vivant à Washington et non le cadavre du président.
Mais, au Congo, les onze gars du comité militaire du parti, et le ministre de la défense en premier, se sont congratulés en s’attribuant des galons : le lieutenant est passé capitaine, le capitaine est passé commandant, le commandant est passé colonel, et le colonel est passé général!
Rien de moins! Mais le sang des innocents : Ndoudi-Ganga, Germain Mizelet, Samba-Dia-Nkoumbi, Daniel Nkanza, Daniel Kianguila, Simon Sissilou, Pierre Dianzenza, Albert Konda, Grégoire Kouba, Etienne Kikouba, le lieutenant Mboro, le caporal Ontsou crie JUSTICE! Et la liste, hélas, n’est pas exhaustive.
Que celui, qui a entendu et compris, agisse!
Salomon Lasagesse
[1] https://www.youtube.com/watch?v=QfaMF3BbxCI
[2] https://www.youtube.com/watch?v=runnryA_iw0 (***)
https://www.youtube.com/watch?v=GwzE9XXfoJU
https://www.youtube.com/watch?v=c-w-knitqhc
Votre commentaire