La nouvelle crise de la dette est un avertissement pour les banques allemandes «instables» dans le prochain effondrement de l’UE
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« L’Europe est gravement malade », selon Deutsche Bank, et alors que les problèmes de l’Italie ont été bien documentés récemment, les analystes ont dit à Sputnik que regarder de plus près les banques allemandes révèle que même la puissance économique de l’Europe pourrait se trouver en difficultés financières.
Alors que le Brexit semble avoir servi de catalyseur pour la crise politique de l’Europe, les experts financiers avertissent qu’une crise semble également entrain de se préparer sur le front financier européen.
Les faiblesses structurelles qui sont apparues au cours de la crise financière de 2008 n’ont pas été abordées suffisamment, et les analystes craignent que les banques européennes soient confrontées à plus de pression financière qu’elles peuvent lutter avec.
Le dimanche David Folkerts-Landau, économiste en chef pour la Deutsche Bank, a déclaré au journal allemand Die Welt que l’Europe doit prendre des mesures pour faire face à ses problèmes économiques, ou faire face à une autre crise.
«L’Europe est gravement malade, et elle doit répondre de toute urgence à ses problèmes, sinon quelque chose de mauvais va se passer», a-t-il averti, et a recommandé un programme de plusieurs milliards d’euros de recapitalisation pour les banques européennes agitées.
Selon Folkerts-Landau, l’Europe a besoin d’un programme de recapitalisation similaire au Programme de sauvetage des actifs en difficulté (Troubled Asset Relief Program), réalisé aux États-Unis après que la crise des subprimes ait frappée là en 2008. Ce programme a autorisé le Trésor américain à dépenser 475 milliards $ sur les actifs et les capitaux propres toxiques et l’équité des institutions financières en difficulté.
« En Europe, le programme ne doit pas être aussi important. Les banques européennes peuvent se recapitaliser avec 150 milliards d’euros (167 milliards de dollars) », a déclaré Folkerts-Landau.
Le professeur d’économie Guillaume Vuillemey de l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales de Paris (HEC Paris) a déclaré à Radio Sputnik France que les problèmes dans le secteur bancaire de l’Europe ne se limitent pas aux économies les plus stagnantes sur le sud du continent.
Qui va payer le prix pour les dettes bancaires de l’Italie?
La semaine dernière les rapports ont ressorti que l’Italie est confrontée à une crise bancaire, comme son PIB a augmenté de seulement 0,8 pour cent en 2015 et devrait croître de 1,1 pour cent cette année. Cela a rendu plus difficile pour les entreprises là-bas de maintenir les remboursements de prêts avec les banques, qui sont en possession de 360 milliards € en prêts non performants, de loin la plus grande quantité dans la zone euro.
La grande dette nationale du gouvernement italien, 133 pour cent du PIB, aggrave le problème parce que le gouvernement a moins de latitude aux réductions des impôts ou aux augmentations des dépenses publiques pour tenter de stimuler la croissance.
« Le secteur bancaire européen n’a pas beaucoup de capital pour le moment … Les banques italiennes sont dans une position relativement faible en comparaison avec les banques d’autres pays », a déclaré Vuillemey, qui retrace l’instabilité des banques européennes à l’échec de l’Europe de faire face de manière adéquate à sa crise de la dette.
«Il est clair que toutes ces banques continuent de payer pour la crise de la dette souveraine. Seuls quelques-uns d’entre eux ont réussi à atteindre un niveau de capitalisation suffisante pour assurer la stabilité à long terme», a déclaré Vuillemey.
Le ratio dette-PIB dans la zone euro dans son ensemble a augmenté, passant de 69 pour cent en 2008 à 91 pour cent cette année. Alors que l’Italie a augmenté à 133 pour cent cette année contre 102 pour cent en 2008, la Grèce a augmenté de 177 pour cent contre 109 pour cent.
Les achats d’actifs de la BCE vont-ils retarder une nouvelle crise?
Vuillemey a dit qu’il y a plusieurs problèmes auxquels font face les banques en Italie et d’autres régions de la zone euro.
« Il est clair que les banques ont besoin de financement, mais la deuxième question est une autre. Qui est censée le leur donner ? Ici il y a deux possibilités: soit l’UE, ou le gouvernement (national)), ou les marchés eux-mêmes. Il est clair qu’aujourd’hui, la capitalisation du marché est préférable, non pas du gouvernement. Il doit y avoir des mesures stimulatrices afin que les actionnaires achètent plus de titres et ils, et non les contribuables, prendnent sur les risques des actifs bancaires ».
L’économiste a déclaré que le programme d’achat d’actifs de la Banque centrale européenne, qui vise à augmenter l’inflation et stimuler la croissance économique dans la zone euro en augmentant la demande et le prix des obligations du secteur public et privé, ne sont pas une solution à la question financière, car il échoue de réduire la dette souveraine, et a conduit à des rendements négatifs sur les obligations souveraines.
« La BCE par le biais de son programme d’assouplissement quantitatif est entrain d’acheter de grandes quantités de la dette souveraine. Ils achètent ces obligations et donc le prix monte, ce qui réduit leur taux d’intérêt. Nous nous retrouvons donc avec des prêts pour lesquels les taux d’intérêt sont de plus en plus négatifs. »
« Donc, ces chiffres (le prix de la dette de la zone euro) sont vrais en partie, parce qu’une grande partie de la dette allemande est le soutien des taux d’intérêt négatifs pour le moment. »
Pas seulement un problème méditerranéen
Alors que les problèmes de l’Italie, et l’absence d’une solution complète pour la question de la dette, sont devenus bien documentés, Vuillemey a expliqué que les banques allemandes font également face à l’instabilité, en raison de la grande quantité de la dette que les exportateurs ont prise là-bas.
«En termes de l’économie réelle, l’Allemagne est entrain de bien faire, et de la sorte au niveau de la production industrielle. Au niveau du système financier allemand, en particulier en ce qui concerne de très grandes banques, le secteur est très instable », a-t-il averti.
« En particulier (ce qui est un problème) à l’égard du crédit des exportateurs, ce qui fait baisser les bilans des banques allemandes, et certains d’entre eux sont en grand besoin de recapitalisation. »
« Il est donc possible qu’il y ait des choses dans le secteur financier allemand, qui sont des raisons de s’inquiéter pour l’avenir. »
Traduction : Jean de Dieu MOSSINGUE
Source : Sputniknews
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