Une visite désastreuse?
© AFP 2018 Brendan SMIALOWSKI
Derrière les flonflons et les déclarations tonitruantes, l’ovation au Congrès des Etats-Unis, la visite d’Emmanuel Macron pourrait bien s’avérer désastreuse. Car Macron est parti en position de faiblesse, face à un Président américain, Donald Trump, qui était conforté par les premiers résultats de sa politique.
Il s’avère qu’Emmanuel Macron a été dans l’incapacité d’obtenir gain de cause sur quelques grands dossiers que ce soit. De ce point de vue, cette visite est un échec. Mais il y a pire. En matière d’image, cette visite a été une catastrophe. Les photos montrant le Président français soit dans une position ridicule soit dans une position de soumission face à son homologue américains, même si elles ne traduisent pas nécessairement une réalité, circuleront massivement. Emmanuel Macron a commis, avec ce voyage, sa première faute majeure.
L’accord avec l’Iran
Sur l’accord avec l‘Iran, où les enjeux étaient de taille, Emmanuel Macron a subi un échec évident. Cet accord avait, pourtant, stabilisé la situation (1). Qu’il y ait eu des points complexes, et des points de compromis, dans cet accord est une évidence. Mais, il en va de même dans tout accord (2).
L’important était qu’avec cet accord on avait une garantie que l’Iran ne deviendrait pas une nouvelle puissance nucléaire, un acte potentiellement déstabilisant qui pourrait pousser l’Arabie Saoudite et l’Egypte à faire de même, mais qui pouvait aussi se comprendre quand on sait qu’Israël est un proliférateur clandestin massif, avec un arsenal estimé entre 150 et 250 têtes nucléaires. En acceptant de ne pas poursuivre l’enrichissement de l’uranium jusqu’à la qualité militaire, tout en se réservant le droit de poursuivre cet enrichissement pour une qualité civile l’Iran avait accepté le cadre global d’une surveillance internationale.
Donald Trump avait annoncé, dès sa campagne, qu’il voulait sortir de cet accord et le remettre en cause. On en saura plus le 12 mai. Sur ce point précis, la France était sur la même position que la Russie, dont le Ministre des affaires étrangères, M. Lavrov, a déclaré il y a peu que si Donald Trump sortait de l’accord, il pourrait bien être le père du nucléaire iranien. La déclaration de Trump, sur laquelle Macron a donné son accord, de « renégocier » l’accord montre qui a gagné sur ce point. Une « renégociation » est toujours extrêmement difficile sur des sujets aussi délicats que la question du nucléaire. De plus, les derniers actes des Etats-Unis, et hélas de la France, comme les frappes en Syrie, ne peuvent que convaincre les dirigeants iraniens que seul un armement nucléaire les mettra à l’abri des foucades des pays occidentaux. De ce point de vue, on n’a hélas pas fini de mesurer ce que cette action, illégale au regard du droit international, aura comme conséquences en matière de prolifération. Dans ces conditions, on peut penser que les dirigeants iraniens seront beaucoup moins flexibles dans toute nouvelle négociation qu’ils ne l’avaient été de 2013 à 2015, lors de la négociation de l’accord. Surtout, l’idée même d’une « renégociation » implique que le traité existant est caduc.
Trump, Macron et le multilatéralisme
© AFP 2018 Ludovic MARIN
Sur cette question aussi, Emmanuel Macron a largement échoué à faire changer Donald Trump d’opinion. Ce dernier considère, et on ne peut lui donner tort, que ses déclarations fracassantes ont déjà produit des résultats. Et, de fait, on constate que la Chine commence à modifier ses tarifs commerciaux sur les automobiles. On a pu plaisanter sur la « politique Twitter » de Donald Trump; mais on découvre en réalité que cette politique donne des résultats. Et, l’image qui se dégage de Trump est bien différente de celle que nous servent à satiété, et jusqu’à l’écœurement, les grands médias, qu’ils soient français ou américains. Que le Président des Etats-Unis soit un personnage brutal, réactionnaire, avec un goût prononcé pour la provocation est certain. Mais il n’est pas l’imbécile ou l’irresponsable que se plaisent à décrire les grands journaux, de Paris ou de la Cote Est!
On savait le multilatéralisme commercial à l’agonie depuis l’échec du « cycle de Doha » impulsé par l’OMC dans les années 2000. C’était d’ailleurs l’une des raisons qui me faisaient pronostiquer un mouvement de démondialisation dès 2010 (3). Trump en a tiré froidement le bilan. Il ajuste la politique des Etats-Unis à la nouvelle situation. Nul ne peut dire à l’heure actuelle s’il obtiendra le grand mouvement de retour vers les Etats-Unis des industriels qui sont partis dans les années 1990 et 2000. Mais, il a clairement donné un coup d’arrêt au phénomène des délocalisations.
Une erreur d’échéancier
Si Emmanuel Macron a pensé qu’il pourrait se présenter en défenseur des « grands principes », il a manifestement erré. Car, la France est sur ce point isolée. Elle ne pourrait retrouver une certaine capacité de peser sur les décisions américaines que si elle s’associait aux puissances qui contestent aujourd’hui la politique des Etats-Unis, c’est à dire la Chine et la Russie. Et, de ce point de vue, on peut penser qu’Emmanuel Macron aurait bien mieux fait de commencer par une visite à Moscou avant d’aller voir Trump. Cette erreur dans l’échéancier des visites, car il est prévu qu’il rencontre Vladimir Poutine en juin, doit être expliqué. D’une part, Emmanuel Macron participe de cette campagne de certains des milieux occidentaux visant à « démoniser » la Russie. Il a cru renforcer sa position face à Vladimir Poutine, qu’il rencontrera probablement en juin. Mais, en fait, il se présentera, face à lui, affaiblie par ses échecs aux Etats-Unis.
Mais il y a une autre raison qui peut expliquer cette erreur d’échéancier. Emmanuel Macron nourri l’ambition de changer les institutions européennes. Le problème est qu’il s’est heurté à un mur. Privilégiant une relation avec l’Allemagne, il s’est détourné de l’Italie — un pays qui aurait pourtant intérêt à ce changement — mais aussi des pays de l’Europe centrale. Or, l’Allemagne, et il faut savoir que cela concerne tant la CDU-CSU que la SPD, n’a aucune raison, et aucune intention, de changer quoi que ce soit dans l’Union européenne. L’Allemagne profite largement des institutions existantes; elle les défendra sans faiblir. Isolé, sans alliés, sur la question de la réforme de l’UE, et on l’a vu lors de son discours devant le Parlement européen, Emmanuel Macron a cru trouver un allié de circonstances en la personne de Donald Trump. D’où cette calamiteuse visite et les images à laquelle elle donne lieu. Emmanuel Macron est parti nu aux Etats-Unis. Il en reviendra « une main derrière, une main devant » comme on dit dans le midi de la France!
Le choc des images
Reste les images que l’on peut avoir de cette visite. Elles sont déplorables, et surtout leurs conséquences seront lourdes. Les embrassades appuyées (surtout du côté de Macron), la scène assez ridicule où les deux hommes plantent le chêne offert en cadeau, voire cette photo, assez dramatique quant à l’image qu’elle transmet, ou Emmanuel Macron est pris par la main par Trump comme un petit enfant par son père, resteront dans les mémoires. Les français se sentiront, et se sentent déjà, humiliés par le comportement de leur Président. Ce sentiment d’humiliation n’avait pas été pour rien dans le désamour profond qui s’était installé entre les français et François Hollande. Emmanuel Macron glisse rapidement sur la même pente.
(1) http://www.parisschoolofeconomics.eu/docs/haidar-jamal-ibrahim/sanctions.pdf
(2) Joyner D.H., Interpreting the Non-Proliferation Treaty, Londres, Oxford University Press, 2011
(3) Sapir J., La Démondialisation, Paris, Le Seuil, 2010.
Les opinions exprimées dans ce contenu n’engagent que la responsabilité de l’auteur.
Source : Sputnik News – France
Un nouvel axe américano-français s’infiltrera dans tous les dossiers du Moyen-Orient!
Le président américain Donald Trump et le président français Emmanuel Macron à la Maison-Blanche, le 24 avril 2018. ©AFP
De quoi est le signe la « Bromance » Trump-Macron ? Bien que la presse française veuille faire croire à l’existence des « divergences » entre les présidents français et américain que ne saurait cachées la parfaite synergie affichée au cours de la visite de Macron à Washington, la réalité est autrement perçue en Iran. La France de Macron s’est totalement alignée sur la politique anti-iranienne de la Maison-Blanche, et ce, malgré la volonté affichée du chef de l’Élysée de préserver l’accord nucléaire signé en 2015. À Washington, Emmanuel Macron a annoncé être déterminé à « faire face aux missiles iraniens », allant même jusqu’à parler au nom de l’Iran.
En compagne de Trump, il a évoqué la possibilité « d’aboutir à un nouvel accord avec l’Iran », alors que les autorités iraniennes ont réaffirmé à mainte reprise que le PGAC est un et indivisible et surtout non négociable. Le « nouvel accord » avec l’Iran que le président français Emmanuel Macron a proposé mardi 24 avril à son homologue américain Donald Trump, est destiné à aller plus loin que l’accord nucléaire existant, pour répondre aux critiques des États-Unis, dit le président sans se hasarder un seul instant à répondre à la question suivante : « Cet accord, la France compte-t-elle le signer avec qui ? Avec les Américains ou les Iraniens ? »
Interviewé par l’agence de presse iranienne ILNA, Hadi Mohammadi, analyste politique iranien, revient sur les rencontres à Washington entre le président français Emmanuel Macron et son homologue américain Donald Trump.
À quoi joue Emmanuel Macron sur le plan international
La politique étrangère du président français nuira-t-elle à la position de la France sur l’échiquier international ?
Macron veut le maintien de la présence militaire occidentale en Syrie
Le discours d’Emmanuel Macron devant le Congrès américain, le 25 avril. ©AFP
Devant les étudiants de l’université George Washington, le président français Emmanuel Macron a déclaré que la France allait accroître son soutien à la soi-disant coalition antiterroriste menée par son allié américain en Syrie.
« La teneur des annonces faites par M. Macron aux États-Unis et en présence de son homologue américain font part d’un rapprochement sans précédent entre Paris et Washington, un rapprochement qui pourrait présider à l’émergence de nouveaux scénarios anti-iraniens. Mais l’Iran n’est qu’un seul aspect de ce rapprochement. Macron est sur le point d’engager la France dans une aventure sans lendemain au Moyen-Orient, identique à l’aventure libyenne vers laquelle l’ex-président français Sarkozy a conduit son pays ».
(…)
En réalité, le profond lien existant entre l’Europe atlantiste que représente le chef de l’Élysée et les États-Unis ne peut être nié. Sur ce point, les politiques américaines se superposent sur celles du Vieux Continent. Les deux parties pourraient être en litige sur un éventail de sujets comme l’accord de Paris sur le climat, mais ligotée qu’elle est par ses engagements pris dans le cadre de l’OTAN, la France n’osera jamais défier les États-Unis au Moyen-Orient. Ce faisant, M. Macron risque de sacrifier les intérêts du peuple français, non seulement en Iran, mais aussi ailleurs. »
« Depuis l’investiture de Donald Trump, certaines sources disent que l’Europe et les États-Unis sont de plus en plus divisés, mais aucun signe de division n’apparaît à vrai dire. Paris s’est mis littéralement aux côtés de Washington pour lancer le 14 avril des frappes directes contre la Syrie et cela, sans aucune forme de procès, ajoute l’expert qui relève aussi les tensions de plus en plus larges entre la France et la Russie.
“Avant l’accord nucléaire de 2015, la France jouait au méchant lors des négociations entre l’Iran et les 5+1, parce qu’elle craignait pour ‘la sécurité’ d’Israël. Et aujourd’hui encore, c’est pour les mêmes raisons qu’elle réclame un nouvel accord contraignant les activités balistiques iraniennes”, indique l’expert iranien.
Hadi Mohammadi rappelle que la France, côtière de la Méditerranée, est en quelque sorte un voisin à la fois de la Syrie et du Liban et que par conséquent, elle peut très bien jouer le rôle de supplétif des Américains dans le bras de fer que ces derniers ont déclenché contre l’axe de la Résistance : “Les Français partagent pas mal d’affinités politiques et culturelles avec les habitants du nord du Liban. La France connaît donc bien la situation au Moyen-Orient. L’approfondissement des liens entre les États-Unis et l’Europe aura des conséquences tangibles non seulement en Syrie, mais aussi en Irak. Un axe américano-français pourra désormais s’infiltrer dans tous les dossiers régionaux et agir dans le sens des intérêts américains. Entre son indépendance d’action et ses liens avec les Américains, la France semble avoir fait son choix et ce choix risque de compliquer la donne au Moyen-Orient ».
Source: Press TV
Trop de faux sentiments affichés où chacun a voulu avoir le dernier geste de sympathie envers l’autre. Côté français des erreurs de communication qui ont mis en évidence la petitesse face au géant mondial.
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